Une des façons de reprendre l’initiative historique pour les peuples décidés à parler de leur propre voix consiste aussi à décrire par eux-mêmes ce qu’ils envisagent, font, défont, espèrent, rêvent. Evidence ? Tant que règnera sur le monde l’ethnocentrisme européen rien ne sera moins acquis…

Le peuple Burkinabé, peuple africain subsaharien, après avoir enduré un régime autoritaire de près de 30 ans initié par l’assassinat du très emblématique capitaine Thomas Sankara, a chassé du pouvoir celui qui s’était présenté comme son président, Blaise Compaoré. Avec un sens extrêmement louable du courage sacrificiel et en limitant les dérapages, pillages, vandalismes constatés dans d’autres expériences estampillées «révolutionnaires», le peuple s’est dressé contre un homme. Il a exigé et obtenu le départ de Blaise Compaoré après plusieurs tentatives infructueuses, qui avaient eu le mérité d’accumuler un potentiel insurrectionnel actif.

Quelle monumentale communion que cet acte héroïque, d’un peuple transformant sa colère en action positive, modifiant chimiquement les paramètres de conflictualité qui auraient pu faire perdurer une autocratie soutenue par les nations des Droits de l’Homme ! Là comme ailleurs pourtant, flotte une odeur de vol de l’histoire, avec la reprise de la vieille rengaine occidentale : enfin un «printemps noir» !

Un «printemps» noir, africain, qui serait tardivement venu se joindre, par imitation, à ses devanciers d’hier, les printemps arabes, de Pékin, de Prague, … Bref rien qui finalement ne renvoie à autre chose que l’expérience européenne des révolutions des années 1848 baptisées par les Européens «Printemps des peuples». Il n’y aurait d’expériences humaines dignes d’intérêt que celles diffusées par l’Europe déifiée ; a-t-on bien saisi ? L’Europe, seul sujet de l’histoire assurément…

Le Burkina Faso jouit d’un climat soudano-sahélien avec une saison sèche longue et une saison des pluies plus courte. Merci pour le Printemps. L’aspiration légitime des Africains à se vivre par eux-mêmes, à rechercher leur bonheur selon leurs valeurs n’a nul besoin de «Printemps» importés d’ailleurs. Elle est inhérente aux Africains, aux Burkinabé, bien que des solidarités humaines sincères puissent se développer à travers la planète. Faut-il rappeler que le Mandé sa dota d’une Charte des Droits humains pas plus tard qu’au 13^ème siècle, sans une quelconque aide extérieure ?

Que périssent donc ces «printemps noirs» des regards eurocentriques, ces vols de l’histoire, au profit d’une libération africaine réelle, puissante et solidaire de la totalité du vivant. 

Afreekara